Les Lumbu (Loumbou, Balumbu, Baloumbou) vivent au sud-ouest du Gabon et à l’ouest de la République du Congo (Congo Brazzaville), à la frontière entre les deux pays, près de la côte atlantique. On les retrouve principalement dans la savane de Tchibanga au sud de la Nyanga, vers le massif montagneux et forestier dit « Mayombe des Balumbu », le long de la cote dans les marais de la basse Nyanga, aux alentours de la lagune de Setté Cama (petit village situé sur une portion de terre entre la lagune N’dogho et l’océan Atlantique, au sud du Parc National de Loango), et (avec les ViIi) dans les environs de Mayumba.
Origines et migrations
Ils viennent de Mongo, du côté de Pointe-Noire, par la savane. Ils se divisèrent en deux groupes : Gango (ceux qui sont restés dans la savane) et Baseri (ceux qui poursuivirent leur chemin le long de la Nyanga).Ils furent guidés dans leur migration par les pygmées Babongo qui leurs servaient d’éclaireurs à travers la foret. Un jour, les Babongo revinrent à eux en leurs disant qu’ils avaient trouvé une grande rivière salée dont ils ne voyaient point l’autre bord. Les Balumbu, face à cet obstacle, s’installèrent alors sur la côte.
Parenté linguistique
Les Lumbu appartiennent au groupe Eshira, et font partie des peuples de tradition kongo (de même que les Punu, les Vungu, les Sangu les Vili, les Kuni et les Yombe).Ils furent intégrés au royaume Kongo puis au « royaume de Loango ». Du fait de leur histoire commune, Lumbu, Punu, Echira (et autres) se comprennent facilement et sans interprètes. Notons que le promontoire de Sainte-Catherine (sud-ouest du Gabon) était la frontière du royaume Kongo en direction de l’équateur (D’après les livres des explorateurs portugais).
Vie, société et activités
Les Lumbu sont matrilinéaires, et pratiquent la polygamie (comme tous les autres peuples du royaume Kongo). L’héritage revenait à la famille maternelle. Quand le père est vivant, ses enfants habitent avec lui. A sa mort, s’ils sont jeunes, ils s’en vont chez leur oncle maternel (katsi).
Les cultures étaient les mêmes qu’aujourd’hui : taro, banane, igname en forêt; manioc, maïs, arachides en savane. Ils utilisaient comme instruments la machette (moukouati) et la hache large de trois doigts (itali). La chasse se faisait au piège et au fusil à pierre. Avec les pygmées (Babongo) du Mayombe, il existait une sorte de symbiose ; chaque chef de terre Lumbu avait une troupe de pygmées et leurs fournissait du sel, du manioc, des pagnes en échange de leurs produits de chasse. Autrefois les pygmées chassaient à l’arc (court) avec des flèches empoisonnées, et à la sagaie. Puis ils adoptèrent le filet. L’activité des Lumbu était le commerce du sel, qu’ils tiraient de l’eau de mer. L’eau de mer était évaporée en un jour dans des marmites. Le sel restant était placé dans des paniers tressés de plusieurs dimensions : le ngandi qui pesait environ 3kg, le mbola 15kg, le dilambulu (ou musindi) 50kg. Ils faisaient cette activité avec les vili, et échangeaient avec les Punu qui leurs donnaient des cabris, des marmites, des pagnes, du raphia, etc. Plus tard, le principal objet d’échange deviendra le caoutchouc et, en second lieu, l’ébène, l’ivoire, le raphia et les Palmistes, qu’ils vendaient aux commerçants indresa (anglais), bitanda (portugais), diamani (allemands) qui s’étaient installés à Igotchi (embouchure de la Nyanga) et à Mayumba.
Art, rites et traditions
Grandement influencés par les autres peuples (Punu Vili, Yombé), les Lumbu partagent avec eux les mêmes mythes et croyances sacrés : le Bunzi et le Mbumba (python arc-en_ciel).
Souvent associés aux Punu pour la sculpture de masques blancs, les Lumbu fabriquent aussi des objets peu connus comme des statuettes, des reliquaires et des amulettes. L’usage de figures reliquaires dans le cadre du culte aux ancêtres serait une tradition d’origine Kongo. Ces effigies de bois étaient fichées dans des paniers d’écorce ou des sacs de peaux contenant les ossements des ancêtres. Ils en prenaient grand soin en les mettant généralement au fond de l’ebanza (la case sacrée).
Les masques Lumbu ont des coiffures tressées en kodia et au visage blanchi au kaolin, les statues sont longilignes (aux bras collés le long du corps) ou massives (aux épaules rondes tenant des calebasses ou des objets miniaturisés) mais bien proportionnés.
L’œuvre la plus distinctive chez les Lumbu est le reliquaire d’ancêtres caractérisé par l’emploi du bleu Guimet et son triangle rouge sur le front, avec sur le ventre un réceptacle rond parfois recouvert d’un miroir.
Exogamie des clans
Les Lumbu pouvaient se marier avec des punu ou des vili. Les clans Lumbu sont nombreux : Bayengui, Tchimondo, Bassumba, Bagambo, Bayéma, Badoumbi, Oukongo, etc.
Certains de ces clans ont leur correspondant chez d’autres peuples (punu notamment);
Au-dessus des chefs de clans existaient des chefs territoriaux (« rois ») pour régler, entre clans, les palabres graves (meurtres, incendies, sorcellerie, adultères) ;
La cloche (kindi) servait à appeler les gens. Le chef portait alors un chasse-mouche en queue d’éléphant ou de buffle. On compensait le meurtre d’une femme en livrant une femme, celui d’un homme en livrant un homme; en cas de non remplacement, on coupait la tête du meurtrier. Le voleur qui ne pouvait rembourser devenait esclave du volé.
Chaque clan possédait un territoire nettement défini; le chef de clan répartissait les terres à défricher. Les villages se déplaçaient en cas de morts dus à une épidémie (la maladie du sommeil ou la lèpre) ou de brouilles de familles.
Beaucoup de Lumbu s’en allèrent travailler à Pointe-Noire, à Brazzaville, Dolisie, Port-Gentil. Certains revinrent lorsqu’ils furent vieux ; d’autres non.
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Sources : Lumbu, un art sacré (Charlotte Grand-Dufay); Peuples et civilisations Kongo dans le sud du Gabon (Arsène Francœur Nganga,Roland Christian Mbinda-Nzaou) / Traditions Orales et Archives du Gabon (Hubert Deschamps,1961)
PS : article publié à la demande de Moë M’paka N’tukuni, Ngaangue Mvuumba du Royaume Laongo