La cérémonie d’intronisation de Ngangue Mvumba (continuité du pouvoir royal) devant un bosquet sacré, non loin de sa demeure, est appelée en vili « Lubialulu ».
Durant les sept premières années de son règne, le nouveau souverain, élu, porte le titre de « Ngangue Mvumba » (devin qui couve) ; comparé à l’oiseau couvant précautionneusement ses œufs, il est celui dont la puissance et la sollicitude s’étendent au loin et recouvrent tout le royaume. Le mot Ngangue signifie adresse, intelligence.
Le terme de Ngangue souligne la nature spécifiquement magique des « forces acquises » par le Ngangue Mvumba entre son élection et son intronisation, à l’issu d’une retraite dans le Mayombe auprès des devins (« Singangue ») les plus réputés qui lui dispensent de nombreux pouvoirs destinés à renforcer son autorité et à le prémunir contre les agressions des sorciers.
Avant son intronisation en 2000, le Roi Moe Taty Ier s’était retirés à Sintoukola pendant plus d’un an pour acquérir ses forces magiques qui lui permis d’asseoir sa puissance, son pouvoir et son autorité dans le royaume.
Par sa réputation de clairvoyance et de prestige, Ngangue Mvumba joue aussi un rôle social dont la fonction première est de maintenir la sécurité et la prospérité du royaume.
A la mort d’un roi, comme il se doit et selon la tradition, l’interrègne est assuré par le Mamboma tchilwangu, Premier Ministre du gouvernement royal. Pour information, le Premier Ministre n’est jamais choisi parmi les clans de Diosso (Fumu si), mais à l’intérieur du royaume, en un lieu éloigné des intrigues et des rivalités de la capitale. Le plus souvent, il est originaire du pays Kugni. Le Mamboma tchilwangu est l’intermédiaire politique entre le roi et « Fumu si ».
L’interrègne entre la mort du souverain et l’élection de son successeur peut durer plusieurs années, et variable. A titre d’exemple, l’interrègne entre Moê « Kata Matou » et son successeur Moê Poaty III a duré deux ans, et, celui de Moê Poaty III et Moë Taty Ier a duré 25 ans dépourvu de souverain.
Le futur souverain est toujours issu de la lignée de la famille Nkondi. La lignée Nkata supplée en cas de défaillance de celle-ci.
Une fois, le choix du nouveau souverain effectué par le clan royal, les chefs des vingt-sept clans primordiaux de Diosso confirment ce choix en se réunissant devant la case de l’intéressé pour lui faire part de leur décision.
Dés le lendemain, le nouveau souverain part en retraite dans le Mayombe auprès des devins pour acquérir ses « forces magiques ».
Cérémonie du Sacre
La première cérémonie a lieu à « lubialulu » où se sont réunis tous les « Fumu si » de Diosso et de principaux villages de la province de Mampili, de nombreux devins et les trois masques de rois défunts :
– Mavala i Ngaga
– Nvuduka sa : la
– Tchitomi i mbata
Les têtes sont couronnées de feuilles d’une plante appelée « mambumbulu », des feuilles de palmier disséquées longitudinalement en guirlandes de fibres sont attachées autour du cou et du tronc de chaque personne. Entouré des siens, le nouveau souverain apparaît, installé dans une chaise à porteur en bois de paletuvier (« lwa : da ») dont il descend pour s’asseoir devant l’assistance, sur une natte (« nkwalla »). Le Mamboma tchilwangu se lève et prononce, au cours d’un long discours, les raisons et les circonstances qui ont déterminé les vingt-sept clans de Diosso à choisir ce nouveau souverain. Ensuite, il invite tous les notables à s’unir autour du nouveau Ngangue Mvumba. Le prêtre « Bun : zi » prend la parole pour exprimer sa satisfaction de voir s’achever l’interrègne dont la longueur excessive peut irriter les Bakisi.
Le soir, le nouveau Ngangue Mvumba et ses proches s’installent alors Tchingangue Mvumba, sous un abri provisoire.
Dans les jours qui suivent, les représentants des vingt-sept clans se succèdent dans l’ordre exigé par la tradition, pour désherber un emplacement et construire la demeure royale…
La cérémonie du sacre se poursuit selon le rituel traditionnel strictement exécuté.
Énoncer par le Nthomi Bun : zi devant les notables et les chefs de clans, réunis sur ordre du Mamboma tchilwangu, de la nature et du montant des exigences formulées par Bun : zi pour la constitution de ntheti Bun : zi.
Coiffé de son chapeau de raphia (« ngundu) et habillé en bleu foncé, le nouveau Souverain est assis sur son fauteuil de règne (« libodo lintha : dji »). Une peau de panthères est nouée autour de ses reins, ses épaules sont recouvertes d’un surplis de raphia.
Tenant dans sa main droite une canne sculptée (« buta matali »), le Mamboma tchilwangu touche alternativement chaque épaule du souverain, reculant d’un pas après chacun de ces gestes, il avance de la même distance en accomplissement le suivant…
Le chef du clan Tchimpwatufi longe le cercle formé par la foule et tourne autour du nouveau Roi tandis qu’une fumée épaisse et âcre se répand sur l’assistance.
D’après quelques informateurs éclairés, ce rite a une importante signification et permet de faire un rappel à la modestie destinée à intimider le nouveau roi, à l’aider à se souvenir, à l’heure de sa consécration, que personne n’est à l’abri de la déchéance. Certains ajoutent que la fumée « porte au loin la nouvelle de l’évènement ».
C’est à ce moment que le Nthomi Bun : zi, d’une voix forte, rappelle les obligations et les interdits qui pèseront sur le nouveau souverain :
– le roi ne doit jamais porter de tissu blanc. Tous ses vêtements européens doivent être de couleur noire ou bleue ;
– il ne doit coiffer aucun autre chapeau que le « ngundu »;
– interdiction lui est faite de se promener le jour, de manger ou de boire en public et d’absorber quelque chose offerte par une personne dont l’attachement ne soit très anciennement attesté.
– Il ne peut non plus manger en compagnie un poulet, et certains poissons comme le tilapia (« tchia : la ») et la silure (« mphuli »), ceux-ci ne doivent pas être préparés sur le foyer habituel, non plus le « linga : za ».
A la demande du Mamboma tchilwangu, le nouveau Souverain révèle son surnom de règne qu’il a choisi, il déclare ne plus s’appeler que par ce nom de circonstance. Aussitôt, le Mamboma tchilwangu et les chefs des vingt-sept clans de Diosso enlèvent les rameaux de palmiers qui leur recouvrent le visage et la poitrine, pour les attacher successivement sur le corps du nouveau Roi appelé maintenant Nganga Nvumba.
Tandis que le tam-tam (« ndun : gu », le gong de fer en forme de clochette double dont les deux parties sont reliées par une tige recourbée (« ngondji »), et la trompe d’ivoire et sculptée dans le Mayombe (« mbudi ») résonnent, le Roi se lève et se livre à une longue série de bonds et culbutes.
Une liste chronologiquement des souverains qui régnèrent depuis Nombo Sinda, reine mère et fondatrice au XIIIe siècle de la Dynastie de Loango et ayant comme capitale Diosso, est préparée par les principaux notables.